Une semaine de documentaire sonore avec Benoit Bories – Phonurgia Nova
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Une semaine de documentaire sonore avec Benoit Bories

Une semaine de documentaire sonore avec Benoit Bories

Documentariste et créateur sonore, Benoît Bories a produit des documentaires et des créations sonores pour France Culture, Arte radio, la RTBF, la RTS, Deutschland Radio Kultur et ABC. Depuis quelques années, il élabore des créations sonores pour le spectacle vivant, des installations et des performances live. Au cours de ces expériences, il a été amené à établir un formalisme d’écriture sonore qui lui est propre, empruntant au documentaire social, à la composition acousmatique et à l’écologie sonore. Il a remporté plusieurs prix et nominations à l’international pour son travail sonore.

En mai prochain, il animera un nouveau Workshop de « documentaire sonore de création ». Pour la première fois transplanté dans un village isolé des Hautes-Corbières, cet atelier permettra à huit participants d’accomplir le trajectoire complète d’une création, en sept jours bien remplis, en explorant tout le potentiel narratif et sonore de ce hameau. 

Q—Peux-tu nous parler de l’atelier que tu vas animer en mai ? En quoi consiste-t-il, pratiquement ?

Benoit Bories — L’idée générale est d’interroger et d’explorer les frontières du réel et de la fiction et de construire un récit sonore qui ne puisse qu’exister que dans cet espace dématérialisé qu’est la radio. Pratiquement, nous allons imaginer collectivement un projet sonore documentaire à partir des situations et des sons du lieu où nous nous trouverons. Ce qui veut dire beaucoup de mise en pratique et l’exploration de différentes formes d’écriture. Les participants sortiront de cette expérience avec des réponses à leurs questions mais, je l’espère aussi, avec de nouvelles hypothèses sur la manière d’envisager leurs projets documentaires futurs. Durant ces quelques jours, nous allons beaucoup écouter et échanger autour d’exemples de créations documentaires, mais aussi cultiver cet art de l’écoute qui en est le fondement, en croisant les sensibilités de huit personnes.

Q — C’est la première fois que ce stage se déroulera à Termes. Qu’est-ce que cela va changer ?

BB — Termes diffère considérablement d’Arles ! C’est un endroit très isolé, baigné de silence, avec en général peu de traces sonores humaines. Ce village des Hautes-Corbières est un peu au bout du monde. Il est situé dans une zone où la densité de population de grands-ducs est la plus forte de France. Ici, peu d’humains, beaucoup de paysages sans traces sonores d’une quelconque activité. C’est un château d’eau naturel. Il en résulte une faune plus importante qu’ailleurs. Une famille de visons a ainsi élu domicile en bord de rivière. Chiens et chats circulent dans le village de jour comme de nuit. On peut souvent voir au printemps des petits ducs perdus dans la bambouseraie. La nuit, il faut être attentif à la genette qui pourrait traverser la route. Habiter Termes signifie ne pas avoir peur de la solitude et surtout savoir la combler par un contact permanent avec son environnement proche : avoir ses coins privilégiés, entretenir une relation régulière avec certains habitants non-humains. Cela marque en profondeur l’esprit du village et confère une personnalité particulière à ses habitants.

Q — En somme, pour ce groupe, il va s’agir de faire œuvre sonore en se mettant au diapason d’un village ?

BB_ Il faudra rester en mouvement perpétuel, être sensible aux appels d’air générés par le lieu. C’est un programme précis et vaste à la fois, qui doit permettre à chacune ou chacun de suivre une piste documentaire particulière sans perdre de vue que notre travail collectif sera de les raccorder en une suite narrative. Il y a un enjeu d’apprentissage technique, mais aussi un enjeu de transmission dans la manière de structurer une narration sonore à partir du réel. Termes est aussi un cadre idéal pour un séjour collectif en immersion, il est propice aux discussions/moments informels qui ont aussi leur importance d’un point de vue pédagogique.

Q – L’habitude de ce stage dont l’architecture a été pensée il y a 30 ans par la documentariste Kaye Mortley est de partir d’un mot pré-texte ou d’une citation comme matrice ou point de départ. Conservez-vous ce principe ?

BB — Oui, je trouve ce procédé stimulant et il a du reste montré sa fécondité depuis longtemps. Pour cette session, j’ai arbitrairement choisi le mot-prétexte de « symbiose ». Ce choix découle des qualités « géopoétiques » de notre lieu de stage.

Q _ Ce programme est-il réservé aux professionnels du documentaire ou de la radio ?

BB _ Absolument pas, les stagiaires viennent souvent d’horizons très différents (cinéma, photographie, arts pastiques, spectacle vivant) ; certains d’entre eux n’ont jamais fait de radio. Néanmoins ce programme s’adresse à des personnes qui ont déjà une petite pratique sonore, quelques bases concernant la prise de sons ou le montage, et souhaitent aller vers des écritures documentaires poétiques.

Q _ Sept jours, c’est à la fois court et long. Comment se déroule la semaine ?

BB _ La période d’enregistrement court habituellement sur trois ou quatre jours. Parallèlement, la matière récoltée est montée, les stagiaires choisissant parfois de travailler par deux ou par trois. Et dans des discussions de groupe, on essaie d’analyser pourquoi certains éléments sont retenus, d’autres pas ; ce qui est intéressant radiophoniquement parlant, ce qui l’est moins ; ce qui fonctionne et ce qui fonctionne moins bien. L’atelier est un banc d’essais. A partir du quatrième jour, on commence la construction de la pièce sonore, ce qui prend d’habitude au moins deux jours. C’est là que ce qui constitue la syntaxe d’une véritable écriture radiophonique est ciblé. La matière sonore est rassemblée dans un seul ordinateur et disposée telle qu’elle sera mixée. Suit le mixage. Puis en général une écoute publique. Il serait évidemment possible de procéder tout autrement dans un stage dont tous les participants seraient de même niveau ou qui durerait plus longtemps. En fonction de la composition du groupe et du bagage de chacun, on pourra essayer de réaliser plusieurs productions différentes à partir de la même matière. Ou bien, demander à chaque stagiaire de faire un petit module, afin de finir avec toute une série de petites formes qui pourraient être agencées de telle sorte qu’elles fassent un tout. C’est peut-être ce que nous ferons cette fois ?

Présentation du stage et inscriptions ici