Prix du Paysage sonore (Field Recording) – Phonurgia Nova
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Prix du Paysage sonore (Field Recording)

Prix du Paysage sonore (Field Recording)

Quand on pense paysage, on pense aussitôt à la photographie, surtout à Arles. Pourtant, voilà plus de 50 ans que le paysage fait l’objet d’une attention soutenue de la part des artistes du son. Plus qu’un simple thème d’inspiration, davantage qu’un objet d’étude, il est devenu un support de création. En France, les pionniers de cette démarche ont été dès le début des années 60 l’artiste plasticien franco-danois Knud Viktor et un peu plus tard le compositeur Luc Ferrari avec son fameux Presque rien n°1. Dès l’apparition du magnétophone à bande portable, ces artistes ont mis en évidence, à l’aide de micros, des dimensions cachées constitutives de l’identité des paysages. À leur suite, toute une génération d’auteurs fait de l’écoute de l’environnement un champ d’investigation privilégié, polarisé par cette question centrale : comment déplacer les frontières de l’écoute pour mieux prendre en compte le monde qui nous entoure ?  En se focalisant sur la nature, certains s’attachent à nous en révéler la beauté et la force hypnotique.

Cette ” nouvelle tradition” se déploie principalement dans deux directions complémentaires : l’écoute des paysages dans le miroitement de leur complexité écologique, et la saisie de la vie animale dans ses manifestations les plus ténues. C’est à cette première veine qu’appartiennent les Images sonores de Knud Viktor (exposé au Musée Réattu en 2009). Un titre qui s’est imposé à lui dès 1964, et à travers lequel il affirmait sa dimension de peintre sonore : “Je ne prétends pas faire de la musique, même si ce que j’entends dans la nature est produit par des forces qui cherchent une harmonie… En cueillant des sons qui organisent des intensités sonores que je veux les plus inattendues, les plus contrastantes, modulées, dissonantes, j’essaye d’obtenir par le son, l’air, la lumière, le vent, les pluies et aussi le roc, la végétation rugueuse et parfumée du Lubéron…“

Comme le souligne le compositeur et artiste sonore Alessandro Bosetti : « Un paysage peut être entendu de différentes manières : on peut s’y baigner comme dans une rivière qui coule à l’infini ou le fixer comme le fait le premier regard avec une image ; on peut en examiner de près les détails les plus intimes ou les éloigner pour en faire un arrière-plan quasiment imperceptible qui colore notre expérience quotidienne. L’auditeur immergé dans un paysage enregistré peut adopter un rôle actif ou, au contraire, laisser les sons agir sur son imagination de manière inconsciente ».

De fait, il n’y a pas une posture unique d’écoute mais mille façons de déplacer son attention à l’intérieur du paysage, et c’est ce que le Musée Réattu entend révéler à travers la collection qu’il développe et à travers ce Prix dont « La Chambre d’écoute » se fera l’écho. Le dépôt de la création Acoustic Catacombs de Hanna Hartman, par le CNAP, en 2010, et, la même année, l’achat d’une oeuvre installative de Maxie Göetze marquent le véritable point de départ de sa collection d’art sonore axée sur la lecture du paysage. La mise en exergue du son par le Musée Réattu participle d’une réflexion générale sur la porosité des expressions, le dialogue entre les disciplines, conduisant à une re-définition de la notion d’oeuvre.

Les nominé.e.s

Mark Ferguson / Présage (autoproduction, Grande Bretagne); Nikki Sheth / Mmabolela (autoproduction, Grande Bretagne); Fausto Caricato / Pizzo Marina, Estate 2019 (autoproduction Italie); Félix Blume / Amazônia (ARTE Radio, France); Jürgen Seizew / Watch your head (Deutschlandfunk kultur, Allemagne); Thibaut Quinchon / Dissociation, Vallée de la Rivière Rouge, juillet 2019 (autoproduction, Canada); Pablo Sanz / Strange strangers (Czech Radio, République Tchèque); Yoichi Kamimura / Hyperthermia (autoproduction, Japon).

Le Prix du Musée Réattu / Ville d’Arles 2020 est attribué à

Pablo Sanz pour strange strangers – 37’28, une production R(A)DIO(CUSTICA), Czech Radio (eský rozhlas Vltava• Ro3), République Tchèque, avec l’aide de l’Institut Mamirau (Brésil) et de la Fondation Santander

Artiste-compositeur-chercheur, il se partage entre Espagne et Irlande du Nord. Sa pratique forme une enquête sans fin sur l’acte d’écoute, avec un accent sur les limites de la perception et de l’attention, encourageant une conscience écologique sensorielle. Basé sur des enregistrements réalisés à l’intérieur des territoires d’Aman et de Mamirau au centre de l’Amazonie, cette pièce propose des perspectives inhabituelles (en surface, sous l’eau et dans le registre des ultrasons), invitant à évoluer dans un monde singulier de présences non-humaines.

Une mention est accordée à

Mark Ferguson pour Présage – autoproduction (Grande Bretagne)

Basé au Royaume-Uni, connu pour ses enregistrements évocateurs des espèces animales, Mark Ferguson est un artiste sonore et acousticien de la faune. Son travail a été diffusé et joué dans le monde entier.

« Réveillon de la Saint Sylvestre 2020. Mes micros sont cachés dans un arbre sous un grand nid de corbeaux en Angleterre, près de la rivière Severn.
À minuit, villages et villes environnantes rompent le silence. Des explosions se font entendre au loin. Depuis une ferme voisine, un coup de fusil est tiré en l’air avec une arme de chasse. Plus j’écoute cette scène — la peur soudaine et l’inti- midation adressée aux autres espèces — plus je la comprends comme un aver- tissement, un présage pour 2020, lorsque la nature nous rappelle la place qui nous revient. »

Ces créations seront à retrouver en 2021 dans la Chambre d’écoute du Musée Réattu