
Chambre d’écoute Kaye Mortley
Son’arles (bis) de Kaye Mortley
« Il y a longtemps – peut-être lors de mes premières rencontres avec le travail de l’ACR de France Culture – j’ai rencontré une phrase :
« Écrire avec des sons ce que seul le son sait dire» …
Sans savoir d’où elle est venue, ni – à vrai dire – ce qu’elle voulait dire, je l’ai adoptée.
Depuis elle me sert de guide… d’interprète…
Car le son parle une étrange langue étrangère.
Une langue composée de sons réels qui – subitement – se vidant de leur substance, deviennent
irréels…
Et de mots qui se délestant de leur sens deviennent simplement des «sons».
Pendant que je construisais Son’arles (bis) la petite phrase énigmatique (de Robert Bresson) ne m’a
pas quittée…
Ni cette autre phrase de Roland Barthes : « La ville est un idéogramme, le texte continue… »
Son’arles (bis) est composée d’une quinzaine de séquences. «Le son d’Arles» est partout :
entre les pierres, dans les rues, dans les airs, rebondissant contre des murs où, déjà – depuis
des milliers d’années- résonne l’écho réfracté du réel.
Son’arles (bis) est une histoire de résonances.
« Le son est souvenir. » Kaye Mortley
Kaye Mortley a animé de multiples journées, ateliers et séminaires sur le documentaire de création.
Notamment à Arles depuis 1989. Elle a fréquemment participé au jury des Prix du concours
international Phonurgia Nova né à Arles en 1986 dans les bureaux d’Actes-Sud. Son travail personnel cherche à interroger la spécificité du documentaire de création : explorer les frontières du réel et de la fiction, forger une syntaxe et un vocabulaire radiophoniques, construire un récit qui ne peut exister pleinement que dans cet espace dématérialisé qu’est la « radio ».
Ses productions voyagent sur les ondes de toute l’Europe et bien au-delà.
Australienne d’origine, basée depuis 40 ans à Paris, Kaye Mortley a commencé à « écrire avec les sons du réel » à la suite de sa découverte de l’ACR (Atelier de création radiophonique) de France Culture dans les années 70, alors qu’elle travaillait à la radio publique australienne ABC. Une époque où les auteurs radiophoniques (comme certains cinéastes) délaissaient le studio pour la rue, à la recherche d’une autre façon de faire. L’extrême finesse de ses mixages, la qualité formelle de ses productions lui ont valu d’être primée dans de nombreux festivals internationaux comme le prix Futura de Berlin (1979, 1985, 1991), le prix Europa (1998, 2001), le prix Italia (2005), le Grand Prix de IRIB (2006). La SCAM lui a accordé en 2017 son grand prix pour couronner l’ensemble de son oeuvre.
Qu’appelle-t-on “Documentaire sonore de création” ?
Selon Kaye Mortley, “c’est un nom que l’on donne (un peu « faute de mieux ») à un type
de radio où le réel glisse vers autre chose (« la fiction » ou « l’art », peut-être) … Un type de
radio dont le but est moins d’instruire et d’informer (bien que ni l’information, ni l’enseigne-
ment n’en soient exclus) que de créer un univers (au sens large) tissé de sons réels. Le “sujet”
importe peu, précise-t-elle, n’étant souvent qu’un prétexte permettant à l’auteur de parler de
quelque chose de plus universel — ou de plus intime que ledit sujet”.
Son’arles (bis) est présentée au public sur enceintes Cabasse, jusqu’au 30 septembre 2025, dans La Chambre d’écoute du Musée Réattu.
