
Jérôme Peignot, l’Acousmate
Nous apprenons avec tristesse le décès ce samedi 19 juillet 2025, de Jérôme Peignot, écrivain, spécialiste de la typographie et homme de radio. Né en 1926, il est le fils d’une cantatrice célèbre, Suzanne Peignot, et l’héritier d’une florissante lignée de typographes, initiée par son grand-père George – l’inventeur des polices Grasset, Cochin et Garamond. Il est proche de sa tante Colette, la « Laure » de George Bataille, dont il publia les “Écrits” en 1976 chez Jean-Jacques Pauvert.
Romancier, traducteur, sémiologue, Jérôme Peignot est surtout connu pour être un grand spécialiste de la typographie, il est d’ailleurs le premier « typoète » – mot-valise qu’il forge pour parler de son œuvre.
A porter à son crédit : il fut l’inventeur (au sens de trésor linguistique redécouvert) en 1960 du mot “acousmatique” tiré de ses lectures de Pythagore, proposé à Schaeffer et François Bayle qui l’ancreront dans le vocabulaire contemporain. Dans cet entretien filmé il y a plus d’un an par Martial Verdier pour la revue en ligne TK-21, il revient sur la généalogie de ce concept très pratique pour désigner les dispositifs d’écoute qui dissocient le visible de l’audible, comme la radio par exemple, qui fonde précisément son pouvoir expressif sur cette dissociation. A noter tout de même, contrairement à ce qu’affirme dans un post Facebook Benoit Peeters : “musique concrète” et ” acousmatique” ne s’opposent pas. Jérôme Peignot trouvait fâcheux que musique “concrète” devienne l’antonyme de musique “abstraite”. Il a suggéré “acousmatique” pour définir plus précisément ce par quoi cette musique concrète (issue de la manipulation d’enregistrements) se distinguait de la musique contemporaine ordinaire (celle procédant d’une écriture sur partitions confiées à des musiciens). L’autre raison qui poussait à préférer “acousmatique” est que le mot “concret” en anglais signifie “béton”, ce qui pouvait nourrir une forme d’incompréhension à l’égard de la nouvelle venue.
Retrouver Jérôme Peignot dans la revue TK21
© Stage Field recording par Félix Blume, Place St Roch, Arles
